handicapés :survivre en prison traitement inhumain
S., détenu à la maison centrale de Poissy, est aveugle et handicapé. En septembre 2006, il a été transporté à l'hôpital dans des conditions inadaptées à son état. Dans un courrier adressé à l'Observatoire international des prisons (OIP), S. dénonce cet épisode "dégradant" pour lui et autorise l'organisation à publier ce témoignage:
"Etant installé sur un fauteuil roulant, des surveillants m'ont posé dans un camion, sans ajuster ni caler le fauteuil (freins), ce qui a eu pour effet de me faire cogner, de me causer vertiges et nausée du transport, car dans ma non-voyance, je suis dans l'impossibilité de me retenir, étant enchaîné, ne pouvant en aucune manière anticiper les mouvements du véhicule."
Ces lignes ne sont finalement parvenues à destination qu'en février 2007 sans la mention "autorisation pour publication.
Le cas de S. révèle l'abandon ordinaire de quelques 5 000 personnes handicapées dans les prisons françaises (selon le CCNE, 2003). L'administration pénitentiaire comptabilise 195 handicapés "moteurs" dans ses établissements mais ne prend pas en compte les handicapés mentaux, les personnes âgées ou affaiblies.
"Les études, superficielles, ne rendent pas compte de la population carcérale ayant des dépendances physiques très fortes. Or, sans étude régulière, comment établir une politique de soin et de prise en charge adaptée? Il n'y a d'ailleurs aucun établissement pour peine disposant de locaux aux normes", déplore François Bès, de l'OIP.
D'autres exemples:
"Depuis trois mois, je n'ai pas pu prendre de douche"
Absence de rampes d'accès ou d'ascenseurs, présence de nombreux escaliers, soins médicaux inadaptés, isolement, impossibilité d'accéder aux sanitaires, aux douches, aux promenades... les détenus handicapés pâtissent de l'inaccessibilité des prisons. Dans la revue "Dedans, dehors", consacrée au monde carcéral, certains témoignent:
"Ici, on ne m'a toujours pas autorisé du matériel pour apprendre à lire et à écrire (...) Etant dans le noir total et ne pouvant guère bouger, je suis obligé de passer 90% de mon temps sur mon lit. Je subis de multiples fois par jour l'intrusion de personnes qui ni ne préviennent de leur arrivée ni ne frappent à la porte. Lors de fouilles de ma cellule, on peut modifier l'ordre de rangement de toutes mes affaires, là encore sans me prévenir."
Aveugle, Poissy (Yvelines).
"Depuis trois mois, je n'ai pas pu prendre de douche. L'administration m'a répondu qu'elle devait s'équiper."
Paraplégique, Tarascon (Bouches-du-Rhône).
"Comment puis-je faire pour avoir un interprète pour m'aider lors de mes entretiens avec les psychologues, pour vendre mes compétences, pour avoir du travail, pour discuter avec les différents services?"
Sourd-muet, Fresnes (Val-de-Marne)
"Certaines nuits, il m'est arrivé de dormir assis sur mon fauteuil, la tête sur la table. Je n'ai toujours pas pris l'air depuis mon arrivée car il m'est impossible d'avoir accès à la cour de promenade."
Personne en fauteuil roulant, Brest (Finistère)